Confidences sur l’oreiller
Sa main courrait sur la texture soyeuse de la nuisette couleur crème que portait la femme qui partageait son lit depuis plus de trois mois.
Il la sentit frémir sous ses caresses et il ne put s’empêcher de sourire. L’un en face de l’autre, le regard perdu dans les yeux de l’autre, ils se contemplaient sans échanger une parole.
Avec lassitude, il s’attarda sur le haut de l’épaule dénudée et fit de petits cercles du bout des doigts descendant graduellement, accentuant la caresse au creux de son coude, traçant avec délicatesse les plis de la peau.
Il continua son ascendance et entrelaça ses doigts dans ceux de la jeune femme. Il releva leurs mains enlacées et les portèrent à ses lèvres, déposant un léger baiser sur la main douce de sa compagne.
Son autre main libre vint réchauffer la joue rosie de Mac qui ferma les yeux pour profiter de l’instant.
_Harm, murmura-t-elle dans une voix délicieusement basse. Tu avais un autre rêve que celui d’être pilote ? Demanda-t-elle avant de poser ses lèvres dans la paume de main de son compagnon.
Harm resta interdit un moment, observant sa petite amie, les yeux fermés, cajolant avec tendresse la paume de sa main, posée contre sa joue tiédie par l’atmosphère ardente de la pièce.
_Retrouver mon père, répondit-il d’une voix suave.
Il s’approcha de Mac et replaça une mèche rebelle derrière son oreille, laissant glisser son index le long du visage parfait de sa partenaire. Il se pencha doucement et embrassa son menton, sa joue, son nez et ses lèvres.
_Et toi ?
_Je voulais devenir danseuse, avoua-t-elle un léger sourire sur ses lèvres
Harm la considéra quelques secondes et remarqua la petite étincelle dans ses yeux.
_Tu es sérieuse ?
Elle hocha doucement la tête à moitié enfouie dans le coussin. Sa mèche rebelle barra à nouveau son visage.
_Pourquoi ne l’es-tu pas devenue ?
_Je me souviens de quand j’ai eu ma première paire de ballerines, la joie que j’ai ressentie, la façon dont mon cœur s’est emballé. Tout ça pour une simple paire, répondit-elle en ignorant la question de Harm.
Elle laissa courir ses doigts fins et agiles dans la chevelure brune de son compagnon, jouant avec les boucles humides. Elle marqua les rides près des ses yeux, traçant avec son pouce chacune d’entre elles, marques de l’homme qu’il était devenu.
_Et puis mon premier gala. Cette salle pleine de monde qui s’était déplacé pour venir nous voir progresser sur les planches, continua Mac en laissant sa main sur la joue rugueuse de Harm. J’avais le rôle principal, cendrillon qu’on avait adapté en ballet classique et le prince était le plus beau garçon que je n’avais jamais vu…
Son regard montra à Harm qu’elle était replongée dans ses souvenirs. Il sourit doucement, heureux de découvrir cette part de personnalité si secrète de Sarah Mackenzie.
_Jonathan, il avait deux ans de plus que la plupart des filles de notre groupe et on était toute folle de lui, narra Mac en riant. Ma mère n’arrêtait pas de me répéter que dès que je devais aller à la danse, j’avais des excès de coquetteries mais comme toutes les filles, je voulais être la plus belle pour lui.
_Tu l’es, dit Harm en posant la phalange de son index sur les lèvres humides
_J’avais 5 ans quand j’ai eu mon premier gala et 7 quand mon rêve a pris fin, dit Mac nostalgique
Son regard s’assombrit légèrement, signe d’un événement malheureux dans ce qu’elle était en train de raconter.
_Que s’est-il passé ? Demanda Harm en soulignant la joue de Mac
_Mon père a commencé à boire, avoua Mac en fermant les yeux quelques secondes. Il buvait de temps en temps, quand il y avait des amis à la maison, confia-t-elle le regard perdu dans ses souvenirs. Et puis, c’est devenu plus régulier et de plus en plus. Et un jour, il est entré ivre et l’enfer a commencé
Son regard croisa celui de Harm, attentif à ses confidences. Elle se mit à jouer avec l’ourlet du drap, venant quelques fois par inadvertance contre le torse dénudé de son compagnon. Elle posa sa main à plat sur la poitrine de Harm et remonta doucement vers son cou, laissant sur son passage, un léger frémissement qu’Harm ne put contenir.
_Après la première dispute violente de mes parents, je me suis enfermée dans un monde que je m’étais fabriquée, révéla Mac en reprenant son histoire. Je fermais la porte, dès l’instant où le bruit de la porte qui se fermait résonnait dans la maison. J’en avais fait la promesse à ma mère, un soir, alors que mon père n’était pas rentré
Elle se tut quelques secondes et se rapprocha de Harm qui ouvrit automatiquement les bras pour l’accueillir. Elle se blottit dans le creux de son épaule et respira l’odeur masculine qu’il dégageait.
_Quel genre de monde ? Demanda Harm avec curiosité
Il dessinait des cercles entre les omoplates de Mac, tout en humant l’odeur de ses cheveux longs et ondulés qui lui chatouillait le menton.
_J’étais une princesse, avoua un peu honteuse Mac
Harm ne vit pas le rouge monter aux joues de sa compagne. Il resserra davantage son étreinte autour d’elle.
_Je regardais par la fenêtre, mon esprit s’évadait et qu’importe l’endroit où il allait, je n’entendais plus les cris de ma mère et les excuses de mon père, révéla-t-elle d’une petite voix
Elle n’avait jamais raconté cela avant aujourd’hui. Elle laissa glisser sa main le long des pectoraux de Harm qui se contractaient sous les caresses. Elle stoppa sa main au niveau de son estomac et regarda sa main bouger au rythme de la respiration régulière de son partenaire.
_J’ai attendu mon prince jusqu’à mes 15 ans et après j’ai cessé d’espérer, dit-elle dans un soupir
_Le départ de ta mère ?
Mac acquiesça simplement. Elle tourna légèrement sa tête et embrassa le torse de Harm. Elle releva les yeux vers lui et se pencha pour atteindre son menton qu’elle parsema de petits bisous. Elle remonta légèrement vers sa joue, laissant un filet humide sur son passage et captura ses lèvres qu’elle avait appris à connaître ses dernières semaines.
Harm laissa échapper un léger grognement, tout en ouvrant légèrement la bouche. De sa langue, il vint caresser les lèvres de sa compagne. Joueuse, Mac mordit la lèvre inférieure de son partenaire et mêla sa langue à la sienne.
Le ballet dura quelques minutes, créant une bulle autour du jeune couple amoureux. Mac mit fin à l’étreinte et reposa sa tête au même niveau que celle de Harm. Couchée sur son flanc droit, elle pouvait apprécier chacune des courbes de son visage.
_Crois-tu encore au prince charmant ? Demanda Harm le plus sérieusement du monde
Mac le considéra une seconde avant de lui sourire avec franchise.
_Je suis une grande fille, Harm, dit Mac en riant
Harm la suivit dans son rire.
_J’ai joué un prince dans une pièce théâtrale de l’école, dit Harm en lui lançant un sourire mutin.
_Quel âge avais-tu ? Demanda Mac intéressée
_Je venais d’avoir tout juste 10 ans. Ma mère, présidente de l’association des parents d’élèves avait joué des pieds et des mains pour que j’obtienne le premier rôle.
_Tu n’as pas aimé ?
_J’ai détesté cela, rétorqua Harm en faisant une grimace de dégoût. Sur scène, j’ai oublié la moitié de mon texte et je n’ai jamais voulu recommencer, confia Harm rieur. Mais si tu veux connaître l’un de mes secrets, il y a eu une époque où je regardais pendant des heures par la fenêtre, commença Harm dans un murmure. La fenêtre du salon donnait sur la plage et je pouvais voir les traces de pas de mon père et moi, continua-t-il une voix mal assurée. Je savais qu’elles n’y étaient pas mais j’y croyais tellement fort que j’étais tout simplement capable de les voir
Mac caressa doucement la joue de Harm et posa sa joue contre la sienne. Elle pouvait sentir le souffle chaud contre sa peau.
_Puis les traces sont devenues des ombres et puis les ombres sont devenues mon père et moi, murmura-t-il en fermant les yeux pour mieux se souvenir. Je nous voyais jouer au ballon, je le voyais me porter, je le voyais tout simplement comme je l’avais vu pour la dernière fois avant qu’il ne parte pour le Vietnam et puis un jour j’ai cessé de regarder par la fenêtre. Ma mène n’a jamais su ce que je regardais
Harm soupira et profita du corps chaud de Mac contre son corps à lui.
_Je t’aime Sarah, dit-il en la cherchant du regard. J’ai longtemps arrêté de rêver et je me rends compte que depuis que nous sommes ensemble, je me remets à rêver, avoua-t-il la gorge nouée.
Jamais il n’avait fait de déclaration plus profonde.
Il voulut continuer mais l’index de Mac sur ses lèvres l’incita à se taire. Pour la première fois depuis qu’ils étaient un « nous », il vit des larmes perlées dans les yeux de Mac.
Mais les larmes contenues étaient devenues belles grâce au sourire sur son visage qui les accompagnait.
_Je t’aime aussi, Harm, dit Mac en l’embrassant légèrement. Que dirais-tu si on quittait notre passé et qu’on regardait vers l’avenir, proposa Mac tout contre ses lèvres
La main posée sur la joue, elle croisa son regard brillant d’une nouvelle lueur.
_Si tel est ton désir, princesse, répondit Harm en embrassant le front de Mac.
Le cœur de Harm se mit à palpiter.
_Je peux te poser une dernière question ? demanda Harm un peu sur la défensive
Mac le regarda en fronçant les sourcils. Elle avait remarqué les rythmes irréguliers de son cœur.
_As-tu garder tes chaussons de danse ?
Mac embrassa la joue rugueuse de Harm et sortit du lit. D’une démarche fluide et sensuelle, les cheveux ébouriffés, elle ouvrit l’armoire près de la porte, s’étira vers la plus haute étagère et sortit une boite fermée par un couvercle.
Elle revint s’asseoir sur le bord du lit et posa la boîte rose et jaune devant elle. Harm se déplaça légèrement et entoura la taille de Mac avec son bras et embrassa le haut de la cuisse découverte.
_Ta boîte à secret ? Demanda-t-il en se relevant
Il posa sa tête dans la paume de sa main et observa les gestes de Mac. Elle retira le couvercle et le posa sur la table de chevet. Harm découvrit alors une multitude d’objets marqués par l’âge.
Elle sortit d’abord quelques feuillets gribouillés par une écriture enfantine. Elle les posa négligemment sur les draps et prit alors ses ballerines.
La pointe était usée et noircie. Mac les prit avec délicatesse et déroula les rubans qui servaient de maintien. Elle en posa une et souligna la forme du chausson, le regard dans le vague.
_Tu aimais vraiment ça, dit Harm en voyant le regard émerveillé de sa petite amie
_J’avais l’impression d’être quelqu’un d’autre quand je les portais, avoua Mac en la faisant tourner dans ses mains.
_Pourquoi n’as-tu jamais recommencé ?
Mac haussa simplement les épaules avant de reposer les chaussons dans le fond de la boîte.
_Qu’est ce que c’est ? Demanda Harm en indiquant les feuilles d’un geste de la tête.
_Quelques pensées, répondit Mac en les prenant en main. Tu veux que je t’en lise une ?
Harm hocha simplement la tête, fier de pénétrer dans le jardin secret de sa compagne et meilleure amie.
Elle ouvrit l’une d’elle et se racla la voix.
« Un jour, j’arriverai à faire de ma vie est un rêve. Le soir se couche et mon esprit s’évade vers de lointaine contrée. Une lumière se fait voir, je m’approche et je découvre avec enchantement le sifflement d’un oiseau. La lumière devient éblouissante, je plisse les yeux,le chant devient plus fort. Je lève mes yeux vers cette forme qui ressemble à un arbre, un chêne, je crois et je le vois. Il est bleu comme le ciel, il bouge légèrement les ailes, il me regarde. Il s’envole. Si j’avais des ailes, je ferai de mon rêve une réalité. L’évasion… quelle chance tu as petit oiseau. Vole aussi loin que tu le peux, vole pour nous deux »
Mac se tut et replia soigneusement la feuille.
_J’avais 15 ans, avoua-t-elle en refermant la boite. Elle la posa au pied du lit et rejoignit à nouveau Harm sous les draps.
_Tu es magnifique, dit simplement Harm en posant ses lèvres dans son cou.
Mac soupira simplement de délice en sentant les lèvres de son compagnon sur sa peau. Elle se blottit contre lui et ferma les yeux.
_As-tu un rêve maintenant ? Demanda Harm en traçant une ligne imaginaire le long de l’échine de son amante.
Elle secoua légèrement la tête, chatouillant le menton de Harm avec ses cheveux.
_J’ai tout ce dont j’ai rêvé, chuchota-t-elle en croisant ses jambes à celle de Harm.
_Tu es certaine ?
Mac releva la tête avec difficulté étant donné leur étreinte et rencontra son regard.
_Bien sûr, je suis heureuse avec toi, Harmon Rabb Jr
_C’est réciproque, Sarah Mackenzie. Je t’aime comme jamais je n’ai aimé et je ne veux jamais perdre ça, avoua-t-il en déposant un baiser sur sa tempe.
_Jolie déclaration, Flyboy, dit Mac en laissant courir ses phalanges sur la base de la nuque de Harm. Je t’aime tout autant et même plus.
_Nous sommes amoureux, remarqua Harm en riant légèrement
_Nous le sommes, oui, répondit Mac en souriant à son tour
_Il manque quelque chose à notre bonheur, dit Harm en caressant le bras de Mac
Mac s’éloigna légèrement et le regarda.
_Un bébé ? Demanda-t-elle d’une petite voix
_Avant ça, répondit Harm le regard pétillant. Même si l’idée me plaît beaucoup de te voir enceinte.
_Tu es sérieux ? Demanda Mac surprise d’un tel aveu
La main de Harm descendit sur le ventre plat de Mac. Il dessina le contour du nombril et posa sa main sur sa hanche.
Il sortit de l’étreinte de Mac et se mit légèrement de travers de telle sorte que sa tête soit au niveau du ventre de Mac.
_J’aimerai voir un ventre arrondi, dit-il en accentuant ses paroles par une caresses sur le ventre. Le sentir bouger, continua-t-il tout en laissant sa main posée à plat sur l’estomac, le cajoler, dit-il en effleurant le ventre avec ses lèvres, lui parler, l’aimer
Mac sourit voyant que Harm avait répondu à la question. Elle passa ses mains dans les cheveux de Harm et caressa le haut de sa tête. Harm tourna la tête et la posa sur son ventre sans rompre le contact visuel qu’il venait de créer avec Mac.
_Tu y as déjà pensé, n’est ce pas ? Demanda Mac le regard brillant d’une nouvelle lueur.
Harm hocha simplement la tête.
_Voir le ventre de ma femme s’arrondir au fil des jours est l’un de mes rêves, avoua-t-il en amenant sa main sur la joue de Mac
Mac fronça les sourcils.
_Ta femme ? Demanda-t-elle croyant avoir mal compris
_Si tu le veux, dit-il en se redressant pour lui faire face.
Un large et franc sourire apparut sur le visage de Mac. L’un de ces sourires qui atteignaient la lueur de bonheur dans les yeux. Elle posa ses mains sur les joues de Harm et se pencha pour l’embrasser.
_Je le veux, dit-elle des larmes dans la voix.
Quelques minutes après de cajoleries des deux amants, Mac se sépara des lèvres de Harm.
_Une fille ou un garçon ? Demanda-t-elle en le fixant avec intensité
Harm la regarda avec incompréhension. Il fronça les sourcils, faisant agrandir davantage le sourire de Mac.
_Tu as un assez bon timing, papa, révéla-t-elle en prenant la main de Harm et en la posant sur son ventre plat.
« Confidence : partage d’un bout de soi avec son autre moi »
FIN
Je dédie cette fic à Finou... Ce ptit monde de douceur, il est pour toi ma Finou